Marseille (AFP) – Dans un quartier populaire de Marseille, un cri d'alerte résonne depuis les ténèbres. « Bonjour, on est séquestré pour le réseau. SVP, appelez la police ! », est le message désespéré découvert dans des pochons de drogue par des clients. Ce n'est pas qu'un simple mot griffonné, mais le témoignage accablant d'adolescents piégés dans un système d'exploitation, décrit par le procureur de Marseille, Nicolas Bessone, comme une véritable traite d'êtres humains.
Les chiffres sont alarmants : de nombreux mineurs, souvent en rupture avec leur famille, sont recrutés via les réseaux sociaux pour travailler comme guetteurs dans le secteur de la drogue. À Marseille, cette tendance, qualifiée de « narcotourisme » par certaines autorités, est en forte augmentation depuis le début de la pandémie.
Une actrice associative, qui préfère rester anonyme en raison de la peur ambiante, souligne l'exploitation de ces jeunes : « On leur fait croire que c'est le job idéal, mais pour 100 euros pour des heures de service, cela constitue une exploitation manifeste », dit-elle, le regard lourd d'inquiétude.
Des cas comme celui de Hakim, un adolescent de 15 ans, font froid dans le dos. Que ce soit des violences physiques ou des abus sexuels, ces jeunes sont souvent intimidés au sein de ces réseaux, comme le rapporte le rapport de l'UNICEF qui alerte sur la situation prévalente en France. Après quelques jours d'engagement, Hakim a tenté de demander de l'aide à la police, suppliant pour sa sécurité. D'autres, comme lui, endurent des violences atroces, souvent sans possibilité de s'échapper.
« Ils sont souvent, en quelque sorte, traités comme des mouchoirs jetables, disposables », explique Isabelle Fort, responsable de la criminalité organisée au parquet. Les adolescents, pris dans ce cycle infernal, se voient forcés de commettre des actes pouvant entraîner des conséquences fatales en cas de refus. Des cas récents en cours de jugement mettent en lumière comment les victimes tentent de s'échapper, allant jusqu'à sauter d'un immeuble pour retrouver la liberté.
Voilà pourquoi la justice française commence à rectifier son approche. Une réforme entraînant la reconnaissance de la traite d'êtres humains dans ce contexte est en cours. Les experts, tels que l'ancienne juge pour enfants Laurence Bellon, invoquent une nécessité de porter cette question sous un nouvel angle, élargissant la vision des crimes en reliant ces phénomènes à la vulnérabilité des jeunes plutôt qu'à leur seule responsabilité criminelle.
Alors que des réseaux de trafic continuent de prospérer à Marseille, une véritable réforme est essentielle. La voix des organismes humanitaires et sociaux est fondamentale pour protéger ces jeunes, souvent invisibles aux yeux de la société. L'UNICEF appelle aussi à ce que ces adolescents soient considérés comme des victimes, et non des criminels, poussant les autorités à agir pour leurs droits et leur sécurité.
La réforme juridique en France commence à prendre forme, tandis que les ministères compétents se penchent sérieusement sur la manière de traiter les procédures judiciaires impliquant des victimes piégées dans ce système. Cette prise de conscience pourrait être cruciale pour briser le cycle de violence et d'exploitation et offrir aux jeunes de nouveau espoir.







